jeudi 18 juin 2020

Violence légitime

Mes deux centimes sur certains événements récents.

Le Procureur général François Molins a dit un jour : « Une violence commise contre un policier et une violence commise par un policier ne peuvent pas être mis sur le même plan. Toute violence commise contre un policier est par nature illégitime. Une violence commise par un policier n'est pas forcément illégitime... elle peut même être légitime si elle est nécessaire à la mission de paix et d'ordre public, ou pour interpeller un délinquant. Elle ne devient illégitime que si elle n'est pas proportionnée ». 

L'Etat possède le monopole du maintien de l'ordre public ou du rétablissement de l'ordre public, c'est donc l'Etat qui détient le monopole de la violence légitime. Donc si l'Etat délègue le maintien ou le rétablissement de l'ordre public à la police celle-ci devient détenteur du monopole de la violence légitime. Dans une démocratie, la légitimité de cette violence est fondée sur la conformité au droit et à l'équité, elle-même définie par la raison, le bon sens, la justesse et la mesure, en deux mots il faut donc que cette violence soit légale et proportionnée. Ce sont les limites à l'intérieur desquelles s'exerce la violence légitime. Qui juge de cette légalité et de cette proportionnalité ? La Justice et personne d'autre. Et surtout pas les participants à une manifestation ou les délinquants eux-mêmes.

Si on considère que les manifestants ou les délinquants et les policiers sont à armes égales, c'est à dire que les uns et les autres sont légitimes à employer la violence pour parvenir à leurs fins, c'est la porte ouverte à la guerre civile ou à la guerre des gangs (la police étant considérée comme un gang comme un autre).

Lorsque survient une arrestation, la personne arrêtée subit une contrainte physique qui peut être importante et spectaculaire selon le degré de résistance de la personne arrêtée à la contrainte physique, ou selon le contexte de l'arrestation. De même lorsque des personnes commettent des exactions contre les policiers ou du vandalisme ou encore refusent de se disperser lorsque l'ordre au nom de la loi leur en est donné, la police peut exercer un certain degré de violence à leur encontre, par des armes non-létales en général ou par une contrainte physique. Jamais cette réponse policière ne doit être disproportionnée par rapport à la gravité de l'infraction commise. Toutefois dans certaines circonstances cette proportionnalité peut-être difficile à apprécier par les policiers. Il faudra donc dans certains cas que la justice examine l'ensemble des faits et des circonstances. 

Il est donc imprudent et malsain de se baser sur des images forcément partielles et vues avec du recul par rapport à l'événement. Et ce, dans les deux sens.

Cas de George Floyd : infliger des sévices tels qu'ils entraînent la mort d'une personne arrêtée pour une infraction (quelle qu'elle soit) est évidemment disproportionné, illégal et illégitime.

Cas de l'infirmière de l'esplanade des Invalides : la contrainte exercée sur cette femme ne me semble pas disproportionnée vu les infractions qu'elle a commis avant et surtout vu le contexte et sa résistance à l'arrestation, mais je ne suis pas un bon juge de cette proportionnalité et personne d'autre ne devrait l'être. L'arrestation ne me semble pas illégale. En tout cas aucune justification ne peut être trouvée aux actes (même s'ils sont mineurs) de violence qu'elle a commis envers les FDO car ils sont forcément illégitimes. La Justice aura à se prononcer.

Cas du jeune qui force un barrage ou échappe à un contrôle avec un véhicule volé et a un accident mortel en cherchant à fuir la police : pas d’ambiguïté ici, la police n'a exercé aucune violence illégitime, agissait dans le cadre de la loi et n'a pas directement causé la mort.