Dans un livre passionnant : The Color of Christ, l'auteur Edward Blum avance que les différentes images de Jésus Christ en Amérique expliquent les relations entre les races et la religion dans l'histoire de ce pays. Il raconte en particulier qu'avant le Mormonisme Jésus n'appartenait pas à l'espace Américain, il était d'ailleurs, du vieux monde, de Palestine, du Moyen-Orient. C'était un personnage étranger à l'espace des premiers pionniers d'Amérique. Dans le Livre de Mormon on apprenait que Jésus était venu sur le continent Américain bien avant Christophe Colomb. Cette hypothèse établis une relation entre Jésus Christ et l'espace Américain et redonna aux colons européens une légitimité à réclamer les territoires vierges des Amériques aux Indiens, ceux-ci n'étant plus les premiers et légitimes occupants du territoire.
À cette époque l'image la plus répandue de Jésus Christ était celle d'un homme blanc aux yeux bleus. Selon Joseph Smith, le prophète du Mormonisme, et selon le Livre de Mormon, plus les hommes
étaient blancs de peau plus ils étaient délivrés du péché, donc saints. Par ailleurs, à l'appui de cette thèse, le Livre de Mormon racontait que Noé (celui de la fameuse Arche) avait maudit son petit-fils et que celui-ci avait été banni en Afrique. Les descendants du petit fils de Noé, les Africains à la peau noire, étaient donc, en accord avec la théologie mormone, eux-même maudits. Mais les Indiens d'Amérique, à la peau brune mais pas noire, pouvaient, eux, être sauvés. Joseph Smith alla même jusqu'à enjoindre les Indiens d'Amérique à rejoindre l’Église de Mormon afin de "blanchir" avec le temps et se délivrer des péchés de leurs ancêtres. Par contre les Noirs eux, étant à jamais maudits de Dieu (via Noé), ne pouvaient pas être rachetés. Brigham Young, le successeur de Joseph Smith, édicta même une loi punissant de mort tout homme blanc ayant eu une relation sexuelle avec une Afro-américaine.