jeudi 23 février 2012
Le droit à l'oubli et la censure sur Internet
Il est en effet question d'imposer de très lourdes sanctions financières aux hébergeurs de contenus (comme Facebook, Flickr ou Blogger) et aux moteurs de recherches (comme Google ou Yahoo!) qui n'auraient pas tout mis en oeuvre pour effacer toute information, donnée ou image portant sur un individu que celui-ci voudrait voir supprimées ou rendues inaccessibles au motif que ces informations ou images le mettraient dans l'embarras ou porteraient atteinte à son "droit à l'oubli" (par exemple une personne ayant été condamnée et ayant purgée sa peine). Et ce, même si ces informations sont vraies — contrairement à la diffamation qui ne porte que sur les informations portant atteinte à l'honneur ou à la réputation d'une personne, à condition qu'elles ne soient pas vraies (exception de vérité). Ne seraient exclus de cette loi que l'exploitation de ces données pour un objet journalistique ou pour l'expression artistique ou littéraire.
Le "droit à l'oubli" s'entendrait, selon cette proposition, comme le droit pour une personne de demander la suppression définitive de tout ce qu'il a posté lui-même sur Internet mais aussi de tout ce qui a été republié ailleurs (sur un autre site) sur lui-même avec ou sans son consentement ou de ce qui a été publié ailleurs que sur son propre site, portant sur sa personne et qu'il ne veut pas voir apparaître. C'est à dire de tout ce qui le concerne, partout.
Il y a donc trois cas d'application :
- Si je publie sur Internet une information me concernant ou une image de moi-même, ai-je le droit de demander sa suppression ? Oui, et c'est d'ailleurs proposé par tous les hébergeurs de contenus. Et ça ne pose aucun problème de fond.
- Si je publie une information me concernant ou une image de moi-même sur Internet et que cette information ou cette image est reprise et partagée par un autre site que le mien ai-je le droit d'exiger sa destruction ? Et si la tierce partie impliquée refuse de supprimer cette information ai-je le droit de la contraindre à le faire ? Selon la proposition, oui. Pour ce faire la proposition prévoit que les hébergeurs doivent mettre en oeuvre la suppression des données sur simple demande et sans délai sauf en cas d'exploitation de ces données pour un objet journalistique ou pour l'expression artistique ou littéraire. Et ce sont ces mêmes hébergeurs qui seront juges de ces exceptions et c'est même sur eux que reposerait la charge de la preuve. L'amende au cas où l'hébergeur ne serait pas diligent est tellement énorme (elle peut aller jusqu'à 2% du chiffre d'affaire mondial d'un fournisseur comme Facebook) qu'elle ne pourra qu'inciter les hébergeurs à supprimer les données sans autres formes d'examen. La liberté d'expression est clairement en jeu sur ce point en plus de la sécurité juridique des citoyens, ce qu'on appelle en Anglais, le due process, étant donné que ce serait aux hébergeurs de décider ce qui est légal ou ne l'est pas, sans procédure définie. De plus ce droit à l'oubli peut-être opposable aux moteurs de recherches comme Google ou Yahoo! afin qu'ils suppriment les liens vers les données litigieuses. Au-delà des problèmes techniques que cette mesure pose, c'est la neutralité d'Internet qui est en jeu ici.
- Si quelqu'un publie une information me concernant ou une image de moi, est-ce que j'ai le droit d'exiger sa destruction ? Aux USA, la Cour Suprême a déjà stipulé que les États n'avaient pas le droit de promulguer des lois restreignant la diffusion d'informations vraies mais pouvant être embarrassantes, par les média, tant que l'information a été acquise légalement (en application du premier Amendement de la Constitution des États-Unis). Avec cette proposition de règlement européen, par contre, j'aurais le droit d'exiger de l'hébergeur ou des moteurs de recherche qu'ils détruisent toute mention, même vraie, qui ne me conviendrait pas, sauf si cette information était de nature journalistique, artistique ou littéraire. Une fois encore la charge de la preuve que cette mention est journalistique etc. reposerait sur l'hébergeur ou sur le moteur de recherche , l'incitant à détruire l'information au moindre doute et sans autre formes d'examen ou de procès pour s'éviter des amendes onéreuses. Ce qui reviendrait à faire appliquer la censure par les hébergeurs ou par les moteurs de recherche. Inacceptable, non ? Pourtant sur le point de se réaliser.
Sources :
Stanford Law Review
Peter Fleisher's blog
mercredi 15 février 2012
Amsterdam gelé
Photo Eric Ellis, The Global Mail.
Une image comme celle-ci me donne envie d'aller faire un tour à Amsterdam. J'aime bien cette ville, les canaux, les péniches et l'architecture des maisons flamandes. J'aime bien aussi les vélos et les petites boutiques roulantes qui vendent toutes manières de harengs.
Quoique ça doit avoir dégelé maintenant.
samedi 11 février 2012
En banc
La Cour d’Appel Fédérale des États-Unis du neuvième circuit couvre la Californie et quelques autres États de l’Ouest américain. C’est elle qui, par une cour composée de trois de ses juges, a prononcé la semaine dernière la fameuse proposition 8 (interdisant le mariage gay en Californie) anticonstitutionnelle. Mais l’histoire ne s’arrête pas là pour les défenseurs de la proposition 8. Il y a bien sûr un recours possible devant la Cour Suprême des États-Unis, si celle-ci acceptait de se saisir de l’affaire, ce qui n’est jamais garanti. Et il y a aussi une autre procédure, plus simple, devant la Cour d’Appel du neuvième circuit. Cette procédure exigerait que la Cour d’Appel se prononce “en banc” (en Français dans le texte, j’adore cette expression “en banc” ), il s’agirait de faire juger cette affaire par un groupe de 11 juges de la Cour d’Appel réunis. L’ anticonstitutionnalité de la proposition 8 a été prononcée par une cour de trois juges de la Cour d’Appel, ce qui normal et régulier. Les avocats de la proposition 8 peuvent demander que la Cour se prononce “en banc”, dans l’espoir qu’une majorité de 11 juges de le Cour n’approuvent pas la décision des premiers juges. Et qui plus est, la Cour d’Appel du neuvième circuit possède une caractéristique particulière : la possibilité de faire juger une affaire “en super banc”, c’est à dire par l’ensemble des juges de la Cour. Ce seraient alors 44 juges (moins les 19 en semi-retraite et les 4 postes vacants) qui seraient amenés à se prononcer à la majorité. Le “super banc” n’a jamais été réuni jusqu’à maintenant et il est peu probable qu’il soit réuni pour cette affaire ci. Cependant on voit bien qu’il reste pas mal de chemin avant que la proposition 8 n’arrive à la Cour Suprême, si elle y arrive un jour.
Sources : Concurring Opinions, Scotus Blog.
Scène de restaurant
jeudi 9 février 2012
Frimas
Le froid, toujours le froid. Tous les jours la température descend jusqu'à - 10 la nuit et ne remonte guère au-dessus de - 5 dans la journée. Nous avons eu des froids bien pires mais cette année ça dure. Je suis allé avec l'ami Daylon, voir si la Seine était gelée. Pas encore. Il paraît que le Canal St Martin est une banquise. Beaucoup de touristes encore dans Paris. Ils ont peut-être eu à faire à des voyagistes malhonnêtes ou ont choisi le mois de Février pour visiter Paris parce que c'était vraiment pas cher ! Un peu de neige est tombé mardi soir, juste une petite poudrerie.
Syrie
C’est que la Russie a de gros intérêts économiques et géopolitiques à défendre en Syrie, intérêts qu’elle n’avait pas, ou moins, en Libye. Les Russes ont lourdement investi dans les infrastructures, l’énergie et le tourisme en Syrie, à hauteur de 19,4 milliards de dollars, rien que pour l’année 2009. Les compagnies russes comme Stroytransgaz et Tatneft ont dépensé des milliards de dollars pour développer le secteur du pétrole et du gaz. Les contrats de fourniture d’armement entre les deux pays s’élèvent à plus de 4 milliards de dollars, une récente livraison d’avions de chasse russes à la Syrie a donné lieu à un paiement de 550 millions de dollars. Pas étonnant que les Russes soient opposés à un embargo sur l’armement !
Par ailleurs la Russie possède depuis 1971 une base navale militaire en Syrie, dans le port de Tartous, sa seule base navale en Méditerranée, qui accueille environ 40 navires de la flotte russe dont le porte-avion Kuznetsov.
La Syrie a donc une importance stratégique pour la Russie et le gouvernement de Vladimir Poutine n’est pas prêt à lâcher Bachar El-Assad. En outre les Russes ne voient pas d’un bon oeil les mouvements du monde arabo-musulman, qui ont lieu depuis le printemps 2011. Ils craignent une contagion à leurs républiques du Caucase et en particulier au Dagestan.
Les Américains ne sont pas chauds non plus pour une intervention plus musclée en Syrie. Après l’Irak (une riche idée de G.W. Bush) et encore empêtré en Afghanistan, avec le problème de l’Iran sur les bras, l’administration Obama ne prendra pas le risque d’une aventure contre le régime de Bachar El-Assad. Tout ce que l’Ouest peut faire, et probablement fera, c’est de blâmer les Russes et faire pression sur eux pour qu’ils finissent par lâcher le régime syrien ou qu’ils tentent au moins de l’adoucir et de le forcer à négocier avec l’opposition. Il y aura encore bien des massacres comme celui de Homs avant qu’on en arrive là.
Sources : Truthdig.
Différences
samedi 4 février 2012
Impair
Il arrive parfois qu'on veuille rattraper un impair qu'on s'imagine, à tort la plupart du temps, venir nous hanter plus tard et nous rendre la vie impossible ou du moins désagréable, et qu’en essayant de le rattraper on l'aggrave car la personne auprès de qui on l’avait commis a oublié ou n'y a pas accordé d'importance et nos tentatives pour rattraper notre faute la lui remettent en mémoire ou lui confèrent une importance qu’elle n’avait pas. Quand j’étais en proie à la dépression, sans le savoir ou du moins sans le réaliser, j’étais souvent pris par cette idée, obsédante et exagérée, que j’avais commis une faute grave ou que j’avais trahi une personne. Et cette idée m’obsédait au point de m’empêcher de faire quoique ce soit d’autre, en particulier de dormir ou de lire, jusqu’à ce que je me rachète ou que j’essaye d’effacer l’angoisse en m’expliquant ou en tentant d’atténuer la portée de mes paroles malheureuses. Je sais que c’était un effet de la dépression parce que, maintenant que je suis guéri, ce genre d’angoisse ne m’arrive plus, ou, plus exactement, quand elle arrive je parviens à la chasser de mon esprit conscient sans difficultés. Elle part rejoindre les autres angoisses mort-nées dans les recoins de mon inconscient d’où parfois elle ressort sous forme de rêves, mais changée, transformée en un scénario absurde et décousu. Aussi ai-je toute la compassion et toute la compréhension du monde pour cet homme qui m’a appelé ce matin au téléphone pour s’expliquer, atténuer une parole qu’il avait prononcé hier au repas et que j’avais complètement oublié, à laquelle je n’avais pas attaché la moindre importance.