«Ce qu’il y a de certain, c’est que Maigret boit beaucoup. On est effrayé par ce qu’il consomme. Si on fait le compte des demis, des fines, du beaujolais, des calvados, des marcs, des scotchs et même des chartreuses qu’il avale, on est impressionné par le volume d’alcool qu’il a ingurgité à la fin de la journée. Il y a parfois huit séances en douze heures de Picon-grenadine, de vin blanc, de whisky, sans compter la framboise d’Alsace. Si bien qu’il est souvent repu et somnolent.
D’autant plus qu’il aime les petits plats, la cuisine mijotée, les bistrots de peu d’allure mais dont on se passe l’adresse, et les poêles cylindriques en fonte qui chauffent trop fort, et qu’il est à deux ans de la retraite.
C’est pourquoi je me suis laissé dire par un excellent policier qu’il se mettait dans les pires conditions pour élucider des énigmes. Il ne sait pas résister aux effluves des petits bars. Il a un goût flamand pour tout ce qui sent le propre, le genièvre et la bonne cuisine.
Il atteint la vérité par le calvados et l’andouillette comme M. Pickwick dans Dickens atteint par le punch à la philanthropie.»
(Alexandre Vialatte - Le paradoxal M. Maigret – La Montagne – 10 août 1969)