C'est le premier disque de chez ECM que j'ai acheté, en 1978, sur le conseil d'un disquaire de la rue Gambetta à Poitiers. Un connaisseur. Un jour que je passais par là il avait mis ce disque sur la platine du magasin. Le piano de Keith Jarrett m'avait pour ainsi dire sauté aux oreilles. J'habitais à l'époque une chambre d'étudiant rue des Feuillants à Poitiers au premier étage de la maison d'une artiste peintre, myopathe et qui gagnait chichement sa vie en vendant des céramiques et des tableaux et en louant tout le premier étage, auquel elle n'avait plus accès, de sa maison, un ancien couvent en ruine, à des étudiants comme moi. Je peux dire que je l'ai usé jusqu'à la corde ce disque, à force de l'écouter encore et encore. Je crois bien qu'on finissait par voir à travers le vinyl (oui, c'est une hyperbole, mais pas loin de la vérité). C'est le seul disque que je peux quasiment jouer dans ma tête d'un bout à l'autre.