mercredi 7 avril 2010
Pont d'Austerlitz
Quand il fait mauvais on peut toujours prendre l'autobus pour aller se promener en ville. C'est un moyen de transport très lent mais au moins on peut admirer le paysage. Tandis que le métro, ses tunnels... Il n'y a guère que le métro aérien qui réserve son lot de vues intéressantes. Je pense par exemple à un tout petit tronçon de métro aérien de la ligne 5, très plaisant. Le métro sort de terre après la Place de la Bastille, il a suivi quelques dizaines de mètres le Boulevard Bourdon, le long du Bassin de l'Arsenal et pour traverser la Seine il se met à l'air et passe dessus plutôt qu'en dessous. La ligne enjambe brièvement l'écluse du Bassin de l'Arsenal (il y a une écluse là, en effet, qui permet de faire passer les bateaux de la Seine au Canal Saint-Martin dont le Bassin de l'Arsenal est l'extrémité Sud). On arrive ainsi à Quai de la Rapée et l'on prend un virage assez raide autour d'un gros bâtiment en briques de différentes teintes de rouille qui se trouve être l'Institut Médico-Légal, la morgue. Ici arrivent les défunts pour lesquels la police soupçonne un homicide, ou tout simplement les victimes d'accidents sur la voie publique. Le métro longe à les toucher les murs de la morgue, on s'imagine avec un frémissement les autopsies qui se déroulent derrière ces fenêtres aveugles. Le métro se détourne de ce lieu sinistre et traverse la Seine. Et là, magnifique quoique brève, vue de part et d'autre. Il faut être vif, attention! l'espace-temps de vue est fugitif. Vers l'aval on peut voir le fleuve baignant la pointe de l'Île Saint-Louis et le haut des tours de Notre-Dame, les péniches le long du fleuve et le Pont de Sully, vers l'amont l'arche du Ministère des Finances, les grands immeubles du quartier de la Gare de Lyon et toujours la Seine grise ou glauque, ou légèrement rosée quand le jour se lève. Il y a quelques années de ça je résidais Boulevard Voltaire chez un copain de ce temps là, lorsque je venais à Paris, et c'était fréquent. Le matin aux aurores je prenais le métro ligne 5 en direction de la Gare d'Austerlitz pour rejoindre mon travail à la gare de Blois dans le Loir et Cher. Je ne ratais jamais cette vue, surtout celle en direction de l'aval de la Seine, c'était à chaque fois un petit plaisir que je me faisais. Je l'anticipais, dès que nous avions quitté la station Quai de la Rapée j'étais aux aguets, je choisissais vers quel coté j'allais regarder (en général c'était le coté aval). Je crois pouvoir dire que j'ai pu admirer cette vue à toutes les heures du jour et par tous les temps, vue rapide, d'un instant, toujours belle.