Du vent fort la nuit dernière a secoué mes volets toute la nuit. J'ai bien dormi pourtant, bercé par la tempête. J'aime les intempéries bénignes quand je suis blotti sous ma couette douillette. C'est le froid que je déteste. Le vent, la pluie, ma foi, je ne les trouve pas désagréables. J'ai même de l'affection pour la pluie et la douceur Atlantique et pour les vents qui viennent de l'océan, les westerlies, comme on dit en Angleterre. Et l'été pour les grosses pluies d'orage qui rafraîchissent l'air surchauffé et lavent l'atmosphère.
À midi, entre les grains, je suis allé chez Tschann pour acheter deux ou trois livres: une biographie de Romain Gary qui vient de paraître, les Chroniques de la Montagne de Vialatte et le journal de 2008 d'Hédi Kaddour (dont j'avais aimé le Waltenberg). Je dois souffrir d'une sorte de névrose pour autant aimer acheter des livres. Je suis léger d'argent, mon appartement regorge de livres, je ne sais plus qu'en faire et pourtant j'en achète encore de nouveaux. Les livres sont ma drogue. Je ne bois ni ne fume, je ne me drogue pas, je ne joue pas, je n'entretiens pas une danseuse, j'achète des livres. C'est mon vice. Peut-être le seul avec mon goût pour la nourriture.
En traversant le Boulevard Edgar Quinet, le spectacle des ciels de traîne. Je me suis arrêté pour admirer le contraste entre l'extrémité Ouest du boulevard avec une accumulation de nuages très noirs et l'extrémité Est avec la Tour Montparnasse se détachant sur le ciel bleu profond. Et moi, à l'endroit où, dans Pars vite et reviens tard, Fred Vargas place à midi chaque jour son "crieur". Un soleil printanier, du monde aux terrasses des cafés, l'air propre et lumineux, lavé par le coup de vent.