Paolo Conte nous arrive comme un cheveu sur la soupe. Un cheveu d'or sur la soupe à la grimace.
En pleine apogée de l'hystérie bramante où le décérébré spasmodique nous éjacule aux oreilles les giclées d'immondices anglomaniaques de sa consternante indigence, voici que nous vient, à cheval sur un tabouret de bar prémussolinien, ce Piémontais grave et lent, tout habillé gris sobre de distinguée nostalgie.
Loin des fureurs vulgaires des modes mort-nées, Paolo Conte chante la chanson folle et frivole des années qu'il pleure. Il dit le goût défait des curaçaos amers et des rumbas éteintes.
C'est une voix crépusculaire de vraie virilité. Insolente de facilité. Profonde et sereine, charriant des graviers roses au bord de se briser.
Il chante, et la femme amoureuse de l'amour frissonne au creux du cou. Et le rocker fluet, accablé par tant de beauté, meurt terrassé d'humiliation sous sa prothèse électronique.
Paolo Conte chante. Esthétiquement c'est beau. Moralement, comme toute insulte à la médiocrité, c'est une bonne action.
C'était en 1986.
Et c'est toujours vrai.
Et j'ajoute que pour moi l'Italie que j'aime c'est Paolo Conte, Nanni Moretti, Federico Fellini et pas ce vieux beau populiste de Berlusconi.