samedi 30 novembre 2013

Avions et courant-jet

Je  me demandais ce matin pourquoi les avions en route pour l’Amérique du Nord prenaient une route aussi basse en latitude. D’habitude ils grimpent vers le nord jusqu’à passer au sud du Groenland, car c’est la route la plus directe.

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La réponse a cette question est dans cette carte du jet-stream au dessus de l’Atlantique Nord.

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Comme on peut le constater le jet-stream (en Français le courant-jet) est très au nord de l’Atlantique, si les avions empruntaient leur route habituelle ils se le prendraient en plein dans le nez ce qui les ralentirait et leur ferait consommer un surcroit de jet-fuel. 

Vous pouvez être certain que, par contre, les avions faisant la route Amérique - Europe vont monter très au nord pour avoir le jet-stream dans le dos.

samedi 23 novembre 2013

Bêtes et méchants

Cette semaine j’ai commis l’erreur de lire les commentaires des lecteurs à des articles qui m’intéressaient dans divers journaux, relatants un certain fait divers qui a fait couler beaucoup d’encre (et pas toujours à bon escient) dans nos régions. Bien évidement j’ai été saisi et effaré par la bêtise, l’ignorance et la méchanceté qui s’étalaient dans ces commentaires avec une constance étonnante, laissant penser que seuls les abrutis venimeux s’exprimaient dans ces forums. Je n’ai jamais éprouvé le désir d’écrire un commentaire à un article de journal et je me demande vraiment s’il ne faut pas être un peu timbré, ou particulièrement frustré ou excessivement émotif pour faire ça. Ce qui expliquerait l’indigence intellectuelle et le ton généralement agressif. La lecture de ces forums aurait tendance à faire baisser l’humanité entière dans mon estime, ce qui est, je le reconnais, une réaction épidermique et exagérée. 

Enfin, il y a aussi les réseaux sociaux, Twitter et Facebook. Là encore il ne faut pas chercher beaucoup pour contempler la fange dans laquelle se roulent certains des utilisateurs et je ne parle pas de la simple différence raisonnable d’opinion ou de vues, non, on y lit les jets d’insultes les plus basses et les plus grossières et l’expression d’opinions les plus détestables et les plus idiotes ou ignorantes qui soient, le tout en 140 signes (chez Twitter, et c’est heureux que ces imbéciles n’aient pas plus de place pour éructer leurs insanités). Cependant, à la différence des commentaires des journaux il y a aussi, sur Twitter et Facebook, des choses intéressantes ou drôles et des opinions raisonnables et on peut parfaitement éviter de lire les horreurs. 

Chacun a sa part d’ombre. Chez moi il y a parfois du masochisme et une espèce de joie mauvaise à lire ces âneries, comme si je voulais à la fois me faire peur pour l’état mental de mes contemporains, me rassurer sur mon intégrité mentale et intellectuelle et justifier ma tendance à la misanthropie. Ce n’est pas bien, je sais.

mercredi 20 novembre 2013

Raisonner en conséquence

Je conçus à l’instant la raison du phénomène, allant en avant avec ma raison naissante, et nullement préoccupée. « Il se peut donc, lui dis-je, que le soleil ne marche pas non plus et que ce soit nous au contraire qui roulions d’occident en orient. » Ma bonne mère, à ces mots, crie à la bêtise. Monsieur Grimani déplore mon imbécillité, et je reste consterné, affligé et prêt à pleurer. M. Baffo vint me rendre l’âme. Il se jeta sur moi, m’embrassa tendrement, et me dit : « Tu as raison, mon enfant ; le soleil ne bouge pas, prends courage, raisonne toujours en conséquence, et laisse rire. » Ma mère, surprise, lui demanda s’il était fou de me donner des leçons pareilles ; mais le philosophe, sans même lui répondre, continua à m’ébaucher une théorie faite pour ma raison pure et simple. Ce fut le premier vrai plaisir que j’aie goûté dans ma vie. Sans M. Baffo ce moment eût été suffisant pour avilir mon entendement : la lâcheté de la crédulité s’y serait introduite. L’ignorance des deux autres aurait à coup sûr émoussé en moi le tranchant d’une faculté par laquelle je ne sais pas si je suis allé bien loin ; mais je sais que c’est à celle-là seule que je dois tout le bonheur dont je jouis quand je me trouve vis-à-vis de moi-même.

Casanova - Mémoires ; Chapitre I.

lundi 18 novembre 2013

18ème

On aura compris que je fais une petite fixation sur le 18ème siècle en ce moment. Déjà que j'habite dans le 18ème arrondissement!... Cette brusque admiration pour le XVIIIème siècle a été provoquée par l'écoute des cinq émissions À Voix Nue, sur France Culture, consacrées à Chantal Thomas, un régal, et par la lecture du petit livre de celle-ci, que je ne saurais trop conseiller : Chemins de sable, tout aussi délicieux, où j'ai trouvé les citations des billets précédents celui-ci.

Sagesse du Prince de Ligne

Il ne tient qu'à moi d'être vieux. J'ai de quoi. Mais j'ai dit : je ne le suis pas, et cela me réussit. On peut s'empêcher au moins d'être un vieillard : c'est la paresse du corps et d'esprit qui la constitue. Tant pis pour ceux qui s'y laissent aller. Je me dis aussi : je ne veux pas mourir. Je ne sais comment cela réussira.

Prince de Ligne. Mémoires.

Voltaire et la mort

Je crois, toute réflexion faite, qu'il ne faut jamais penser à la mort. Cette pensée n'est bonne qu'à empoisonner la vie. La grande affaire est de ne point souffrir car, pour la mort, on ne sent pas plus cet instant que celui du sommeil. Les gens qui l'annoncent en cérémonie sont les ennemis du genre humain. Il faut défendre qu'ils approchent jamais de nous. La mort n'est rien du tout. L'idée seule en est triste ; n'y songeons donc jamais, et vivons au jour la journée. Levons-nous en disant : "Que ferai-je aujourd'hui pour me procurer de la santé et de l'amusement ?" C'est à quoi tout se réduit à l'âge où nous sommes.

Voltaire. Lettre à Madame du Deffand. 18 novembre 1761.

Gaieté et tristesse de Madame du Deffand

Moi je ne pense point ; il faudrait que j'eusse recours à des phrases pour dire quelque chose ; je raconte mal, et tout ce que je vois et que j'entends me fait si peu d'impression, qu'il me semble que je n'ai point d'esprit, et que quand mon âme n'est occupée ni remuée, je suis comme un chat, comme un chien, mais beaucoup moins heureuse qu'eux, parce qu'ils sont contents de leur état et que je ne le suis point du mien. Il n'entre point de système dans ma tête sur ce qui pourrait faire mon bonheur ; je voudrais m'amuser à faire des châteaux de cartes et que celà pût me suffire pour me délivrer de l'ennui ; j'y emploierais tous mes moments. Il est vrai que j'ai quelquefois des instants de gaieté : mais ce sont des éclairs qui ne dissipent point l'obscurité ni les nuages. je n'ai point le projet de n'être heureuse que par telles ou telles choses ; je laisse toutes les portes de mon, âme ouvertes pour y recevoir le plaisir ; je désirerais de barricader celles ou entrent le regret, l'ennui et la tristesse ; mais mon âme est une chambre dont le destin ou le sort ne m'ont pas laissé la clef.

Madame du Deffand. Lettre à Horace Walpole, 15 juillet 1770.

mercredi 13 novembre 2013

Mèmes

Je rencontre parfois dans mon travail des théories ou des conjectures qui sont très facilement réfutables et réfutées, mais qui persistent en dépit de toutes les réfutations rationnelles et appuyées de preuves. J'ai observé que ces théories, la plupart du temps des théories explicatives, avaient des caractéristiques bien particulières.
  • La théorie est toujours émise par les acteurs de terrain, en prise quotidienne avec le problème considéré. Jamais pareille théorie ne vient d'en haut, c'est à dire au niveau de la direction. Sa provenance lui donne un aura particulière, l'aura de la vérité de celui qui a observé le phénomène, de ses yeux. 
  • La théorie est astucieuse, bien qu'erronée, elle procure un éclairage inattendu et original sur le phénomène considéré, de fait la personne qui l'émet en retire à la fois un léger plaisir intellectuel et donne l'impression à ses interlocuteurs d'être malin, astucieux et bien informé. 
  • La théorie s'enracine dans l'esprit des gens qui ne cherchent pas à en savoir plus, prend le statut de vérité, puis perdure en se transmettant d'esprit à esprit, exactement comme un virus, un mème
  • Lorsque vous osez contester cette théorie, quand vous présentez des raisonnements, même simples, étayés de preuves, qui la réfutent, l'émetteur de la théorie (acquise sans preuve ni raisonnement, la plupart du temps) a alors deux réactions typiques : 
    • soit il conteste véhémentement votre réfutation (il l'a vu, il a des preuves et au besoin il en invente) et se vexe que vous ayez eu l'audace de le contredire; 
    • soit il vous laisse parler et ne tient aucun compte de vos arguments, ni dans l'immédiat ni dans le futur.

lundi 11 novembre 2013

Férié

Onze novembre, jour férié. Après un weekend en demi-teinte : accumulation de petits soucis, de sentiment d'inadéquation et de culpabilité (non justifiée bien entendu, ça serait trop facile), soirée et nuit de dimanche à lundi avec un mal au ventre désagréable. Après, donc, ce weekend ce lundi est férié ce que je n'aime pas, au mois de novembre, ce qui n'arrange rien et je me sens malade (mais pas de douleurs, juste une sensation de ne pas être dans mon assiette, under the weather, comme on dit en Anglais, un peu fiévreux). J'ai connu des temps meilleurs.

mercredi 6 novembre 2013

Haiyan

On connaît ma passion originale pour les phénomènes météo extravagants. En voici un justement : le typhon Haiyan, qui sévit actuellement dans le Pacifique sud et va probablement secouer les Philippines dans les prochains jours. Haiyan est déjà classé en catégorie 5, la plus forte catégorie, et c’est la plus grosse tempête tropicale, toutes régions confondues, cette année.

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Une belle spirale avec son petit oeil bien rond au milieu, c’est joli vue du ciel mais ça ne présage rien de bon pour ceux qui sont ou seront en-dessous.

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Et voici sa route prévue.

Images NOAA et Weather Underground.

mardi 5 novembre 2013

Racisme ordinaire

Alors que passe le cortège du Ministre de la Justice (une femme, noire), une fillette d'une douzaine d'années, vêtue d'un tee-shirt à l'emblème de la "Manif' Pour Tous", brandit une peau de banane en criant "c'est pour qui la banane? c'est pour la guenon!" Une fillette de douze ou treize ans qui insulte par une injure raciste le Ministre de la Justice! J'avoue que ça m'a estomaqué. Et scandalisé. Scandalisé par l'injure, par l'effronterie, par le racisme brutal et exprimé sans vergogne, par le fait que c'est un enfant qui a proféré cette abominable insulte. J'imagine les parents de cet enfant, l'éducation qu'ils lui ont donnés pour qu'à douze ans elle se permette cela. Ce n'est pas par hasard qu'elle injurie de cette façon une femme, noire, Ministre de la Justice et ce n'est pas n'importe quel produit de n'importe quelle éducation qui peut bien donner ça. Cet évènement est le produit d'une société où le racisme le plus cru et le plus viscéral s'exprime sans inhibition, sans honte, sans scrupule ; où le racisme est transmis aux enfants dès le plus jeune âge. J'avais déjà été choqué à la vue de ces enfants participants aux manifestations contre le mariage gay et cet évènement vient confirmer, pour moi, le malaise grave de la société française.

Un Français de bonne humeur

Paris, jour de pluie de novembre
En ce moment je suis dans une bonne période, mon humeur est joyeuse quelles que soient les circonstances et en même temps j'ai l'impression que mon esprit fonctionne de manière alerte et allègre, moins englué par les émotions négatives et l'anxiété, plus agile et léger en bref. J'espère que cette humeur va durer, mais je ne me fais pas trop d'illusions. Rien n'a changé pourtant, ni dans ma vie ni dans l'environnement : nous sommes en novembre, mois que je hais, il fait un temps d'automne, gris, venteux, pluvieux, les Français sont toujours aussi ennervants et le gouvernement toujours aussi incapable. Mais voilà, rien n'entame ma bonne humeur, pour le moment. Ce matin en sortant de chez moi je me suis rendu compte qu'il pleuvait et j'ai fait le chemin qui me sépare de mon travail sous mon parapluie, content (c'est incroyable n'est-ce pas?) d'écouter en marchant le crépitement de la pluie sur le parapluie. N'allez pourtant pas penser que cette allégresse me rend naïf ou détaché, ou simplement idiot comme le ravi de la crêche. Non c'est une sorte d'euphorie intérieure, qui ne m'empêche nullement d'éprouver des émotions ou de m'indigner de certaines choses mais qui les empêchent de m'atteindre plus que de raison et qui me fait apprécier les simples moments de la vie à leur juste mesure.

Coïncide avec cette période de bonne humeur, le désir fort de lire dans ma langue, la langue française, et de plus m'intéresser à mon pays. Le Général de Gaulle distinguait, je crois, la France (qu'il aimait profondément, du moins son idée de la France) des Français (dont il avait une piètre opinion). Toutes proportions gardées je me sens un peu, sur ce point uniquement, comme le Général. Celui-ci disait : "César disait déjà des Gaulois qu'ils étaient impossibles, capables de grandes choses lorsqu'ils arrivaient par exception à s'unir en face de grands évenements, mais habituellement, divisés, palabreurs, perdant leur temps en parlotes stériles".

 Je ne remets pas en question mon amour pour l'Amérique mais ce pays me restera toujours un peu étranger, je m'expatrirai jamais, je ne serai jamais Américain, quoi que je fasse. Je ne renie pas mon interêt profond pour la langue anglaise et mon plaisir de lire et de parler cette langue, mais ma langue maternelle, et la seule au fond qui compte vraiment c'est le Français.

vendredi 1 novembre 2013

Une belle paire

➞ Brooks and Coulson's 'six-year affair' revealed at phone-hacking trial | UK news | The Guardian

L’affaire des écoutes téléphoniques des journaux Murdoch en Angleterre prend un tour assez croustillant. On apprends ainsi que les ex-dirigeants de ces journaux, Rebekah Brooks et Andy Coulson entretenaient une relation amoureuse à l’époque où ils dirigeaient les journaux en question. Brooks était directrice du Sun et Coulson directeur du News of the World, deux feuilles de choux dont les dirigeants et certains journalistes sont aujourd’hui accusés, comme tout l’empire Murdoch en Grande Bretagne, d’avoir utilisé des écoutes téléphoniques illégales pour alimenter leurs journaux en scoops.

Il faut bien sûr mentionner le fait que Brooks était une amie chère de David Cameron, le premier ministre conservateur de Grande Bretagne et qu’Andy Coulson était même employé, avant son inculpation dans l’affaire des écoutes, comme conseiller en communication à Downing Street sous les ordres de David Cameron.

Les deux amants étaient évidemment mariés chacun de leur coté lorsque leurs journaux dénoncèrent les relations extra-maritales des ministres travaillistes, en exercice, John Prescott et David Blunkett et du dirigeant syndical Andy Gilchrist. Le Sun, dirigé par Rebekah Brooks traitera alors Gilchrist de “a lying, cheating, low-life fornicator” (un fornicateur de bas étage, menteur et tricheur). Le News of the World avait, à l’époque, offert 100 000 Livres Sterling à la maîtresse de John Prescott pour qu’elle leur avoue sa relation avec le ministre et avait fait écouter les téléphones de Joan Hammel, une conseillère du ministre et de deux journalistes rivaux du Mail on Sunday. Lorsque Coulson vint voir David Blunkett pour avoir sa réaction  à l’imminente révélation de sa relation avec une femme mariée, il refusa de dire à Blunkett d’où il tenait cette information. Il fut plus tard révélé et prouvé qu’il la tenait d’écoutes téléphoniques illégales.

Brooks et Coulson ont jusqu’à aujourd’hui nié qu’ils étaient au courant des turpitudes dont sont accusés leurs employés dans les journaux qu’ils dirigeaient.