mercredi 24 mars 2010

Intermède politique

J'écris peu sur la politique française dans ce blogue parce que les opinions politiques enflamment beaucoup trop les esprits et qu'aucune conversation publique n'est réellement possible dans ce domaine, aujourd'hui, en France. C'est un bien triste constat. Il y a une autre raison, moins évidente, c'est que je ne suis pas certain de mes opinions. C'est-à-dire: je ne suis pas sûr de ne pas changer d'opinion sous l'effet, par exemple, d'une argumentation convaincante et sensée. Or, varier dans ses opinions politiques est très mal vu, très mal perçu, même si ces variations sont, sommes toutes, minimes, n'impliquent pas d'immenses revirements, même si je ne représente rien ni personne et n'ai aucun mandat, n'appartient à aucun parti, n'ai pas de responsabilités politiques. Je considère, avec Pessoa, qu'être idéologiquement inamovible, droit dans ses bottes, est la preuve d'un esprit étriqué et fermé, mais je ne crois pas que nous soyons nombreux à penser cela. En politique on ne reconnaît pas la liberté de changer d'opinion.

Pour simplifier je pense qu'en politique il y a deux écoles: ceux qui croient en l'initiative individuelle et qui sont favorables à la libre entreprise et ceux qui mettent au-dessus de tout l'égalité entre les gens et le partage des richesses. Après bien sûr ces fondamentaux se nuancent à l'infini mais en gros c'est comme ça que ça se polarise. Sauf que la richesse à partager ne s'accumule que grâce à l'initiative individuelle et ainsi de suite. Ces deux positions sont, pour moi, fortement imbriquées et ne s'opposent pas toujours. Moi, si j'ai une conviction, une seule c'est qu'il faut mettre la liberté au-dessus de tout. Liberté d'aller et venir, de s'enrichir si l'on en a l'envie, de vivre comme on le désire, de dire ce que l'on pense, de croire ce que l'on a envie de croire, etc. Bien évidemment quand on vit en société la liberté a une limite, celle de la liberté d'autrui. À chaque instant cette idée de liberté est prise dans une série de dilemmes et de paradoxes. C'est ça ce qui est intéressant, du reste, à penser, les dilemmes et paradoxes de la liberté, l'éthique. C'est autour de ces dilemmes et paradoxes de la liberté que mes idées politiques peuvent varier.

C'est aussi pourquoi j'ai du mal à me dire de droite ou de gauche. Pour certaines choses je suis plutôt "de droite", pour certaines autres "de gauche". Je suis inclassable, "ailleurs" comme se disait Michel Jobert. Une chose que je ne suis pas, c'est extrémiste, de droite comme de gauche. Les extrémistes sont, presque par définition, les ennemis de la liberté, étant donné que pour appliquer leurs idées dans le monde réel il faudrait qu'ils entravent fortement les libertés individuelles. Si Besancenot arrivait au pouvoir et appliquait ses idées au monde réel il faudrait qu'il fasse mettre énormément de gens en prison et qu'il fasse confisquer leurs biens. J'ai, dès lors, tendance à juger les hommes politiques à la façon dont ils envisagent les libertés dans leurs programmes et dans leurs comportements. De ce point de vue là je suis plus favorable à Bertrand Delanoë ou Dominique Strauss-Kahn qu'à Ségolène Royal ou Martine Aubry, par exemple. Plus favorable à la droite "libérale" qu'aux gaullistes traditionnels.