mercredi 6 janvier 2010

Supertramp

Paris le 4 janvier 2010
Fait trop froid pour ouvrir les rafraîchissements (Paris, le 4 janvier 2010).

Je ne sais plus qui me disait l'autre jour que Supertramp était un groupe des années 80, ça m'a surpris et c'était faux: "Crime of the Century" date de 1974, "Crisis What Crisis" date de 1975,"Even In The Quietest Moment" de 1977 et "Breakfast In America" de 1979. Je me disais bien aussi. Ça ne correspondait pas à mes souvenirs.

En 1978 quand j'ai découvert Supertramp j'étais étudiant en droit à Poitiers. J'habitais chez Marie-Odile Souchard-Berthon, une artiste peintre et céramiste myopathe qui vivait au rez de chaussée de l'immense maison familiale, l'ancien couvent dit des "Filles repenties", rue des Feuillants. Je louais une chambre au premier étage de cette maison délabrée et étrange qui tombait en ruine de partout et était loin d'être aux normes d'électricité et d'hygiène (il faudra un jour que je décrive les WC et les multiples péripéties que j'ai connu avec ceux-ci, quasiment une légende). Il y avait une cour intérieure en mezzanine sur une autre cour intérieure (en dessous), un seul étage au-dessus du rez de chaussée mais aussi un entresol et trois étages de caves immenses et caverneuses et un grand jardin en friche. Quand on entrait on suivait d'abord un grand couloir le long des ateliers utilisés pour les fours à céramiques, on traversait l'étrange cour en mezzanine et on pénétrait enfin dans la maison proprement dite. Un escalier en pierre en spirale de toute beauté vous conduisait à l'étage où les trois chambres étaient louées à des étudiants. Dans l'entresol il y avait les chambres du personnel de maison, "les deux petites bonnes" dont l'état de la propriétaire exigeait la présence en permanence.

En 1978 il n'y avait que deux étudiants à louer les chambres, mon copain Jean-Paul L*** et moi. Je n'étais pas tellement porté vers Supertramp à l'époque, mes goûts étaient alors dirigés vers les Doors, Pink Floyd, Deep Purple, Yes, Genesis, le jazz et en particulier Chick Corea et la musique "électronique planante" de Klaus Schülze et Tangerine Dream. Jean-Paul L*** lui, était un gars de la campagne aux goûts simples, il aimait les trucs commerciaux, le Disco (il allait guincher dans les bals de campagne tous les samedis) et les Bee Gees. C'est lui qui apporta un jour — il l'avait reçu en cadeau de Noël — "Even In The Quietest Moment" de Supertramp. La galette de vinyl passa alors pendant des semaines sur sa stéréo, en boucle. À force, je me suis mis à aimer ça. En 1979 il remis ça avec "Breakfast In America" et entretemps nous nous étions procurés "Crime of the Century" et son slow d'enfer: "Hide In Your Shell".

Jean-Paul (dit Popaul) partis en juin 79, il fut remplacé par Patrick K*** et par une fille dont je ne me rappelle plus le nom qui fumait énormément de cannabis sous toutes ses formes (en feuille, en poudre, en résine, en graines même), picolait sec, écoutait Robert Wyatt et le "Soft Machine", se baladait dans la maison en pyjama (ce qui nous faisait méchamment fantasmer), ramenait des gens louches dans sa chambre et méprisait hautement Supertramp qui passa d'ailleurs rapidement de mode.